jeudi 8 janvier 2015

Quelques mots qui ne suffisent pas

       


 Quelques mots qui ne suffisent pas...


Hier tu étais malade.
Tu n'avais pas faim, tu étais épuisée, comme nous.

Aujourd'hui, tu manges à nouveau un peu. Comme nous.

Nous, tes parents, sommes un peu déboussolés. Tu donnes des sourires et surtout des espoirs à nos visages sombres et inquiets. Nous nous demandons dans quel monde nous t'avons fait naître.

 Les images tournent en boucle sur l'écran de télé dans un coin du salon.

Le siège du journal satirique Charlie Hebdo a été la cible des tirs de deux hommes lourdement armés...

Nous n'y croyons pas d'abord. Les informations se font de plus en plus précises. On parle d'un attentat. D'un mort. Puis...On apprend que Cabu, Charb, Wolinski, Tignous et Bernard Maris font partie des 12 victimes, aux côtés de policiers, et autres membres du journal.


Une vague de solidarité apparaît sur les réseaux sociaux, mais pas seulement. Les grandes places des grandes comme des petites villes se remplissent et s'illuminent. On dépose des bougies, des fleurs, des messages et des "Je suis Charlie" en pagaille.
Je n'ai jamais vu cela. Ma page Facebook est entièrement dédiée à cela : de nombreux messages, des photos de profil devenues noires ou portant le désormais célèbre "JE SUIS CHARLIE", et surtout, SURTOUT, des caricatures. Partout. Un hommage à ces dessinateurs au crayon rieur , à ces journalistes en verve. Mercredi prochain, Charlie Hebdo sera publié en 1 million d'exemplaires. Il n'en restera probablement pas.


Chaque jour j'ai pour mission d'enseigner à des enfants, de jeunes adolescents, le français. Ils découvrent tout un tas de textes et apprennent par le biais de ceux-ci la tolérance... Mais aussi et surtout, je dois leur apprendre à réfléchir, à savoir pourquoi on dit ou fait ceci et non cela. Ils étudient les textes fondateurs en sixième, puis au fur et à mesure des années, ils découvrent dans les textes,  les satires, les pamphlets, les caricatures. Cela les fait rire.
A nous aussi, cela nous a fait rire. 
Puis pleurer. 



Je suis toujours surprise par leur goût pour l'actualité. Demain, ils vont vouloir savoir. Ils auront vu à la télé, entendu à la radio, par leurs parents, par leurs copains. Que vais-je pouvoir leur dire ? Que vais-je devoir leur dire ?
Je ne sais pas.
Peut-être que je les laisserai discuter entre eux. Mais ils veulent toujours savoir ce que lui, le prof, pense. Alors je ne sais pas.
Je me contenterai peut-être simplement de leur dire qu'ils peuvent continuer de dessiner.
Simplement.



1 commentaire:

  1. Tu pourras leur dire que le plus important, c'est de garder un regard critique sur tout, avoir du recul, ne pas suivre de doctrine ni de dogmes, bref, réfléchir. Ce que les victimes faisaient, ce que les terroristes n'ont pas fait. . Il ne doit pas y avoir de certitude, seulement du questionnement. Et c'est le rôle principal d'un professeur d'enseigner ça à ses élèves.
    Bel article frangine!

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